COBERT Harold - La mésange et l'ogresse
Pourquoi ce livre ?
Pour être tout à fait franche, ma réaction initiale quand j'ai entendu parler de ce livre pour la première fois a été dans le rejet. Le bandeau annonçant "dans la tête de Monique Fourniret" suffisait à ce jugement hâtif ! Qui pouvait bien vouloir être dans la tête de cette femme ???? Pas moi en tout cas ! Adepte des lectures polars depuis toujours, j'aime à savoir que ce que je lis est de la fiction, quand bien même l'inspiration des auteurs prend nécessairement sa source dans la réalité. Je ne suis pas attirée par tous ces ouvrages "psychologico-psychiatrico-journalistiques" qui analysent le mode de fonctionnement des serial killers "historiques". Je ne les dénigre pas mais ce n'est pas ma came, tout simplement !
Or, ici, Harold Cobert relève le pari d'allier réalité et fiction ... Réalité des faits relatés, fiction des pensées exprimées ! J'ai voulu savoir si le pari était réussi ...
De quoi ça parle ?
Une enquête romanesque au plus près de l'énigmatique épouse de Michel Fourniret pour tenter de cerner les terreurs de notre société à travers l'une des affaires les plus retentissantes de ces dernières années.
« Ce que je vais vous raconter ne s'invente pas. »
22 juin 2004. Après un an d'interrogatoires, Monique Fourniret révèle une partie du parcours criminel de son mari, « l'Ogre des Ardennes ». Il sera condamné à la perpétuité. Celle que Michel Fourniret surnomme sa « mésange » reste un mystère : victime ou complice ? Instrument ou inspiratrice ? Mésange ou ogresse ?
Quoi de plus incompréhensible que le Mal quand il revêt des apparences humaines ?
En sondant les abysses psychiques de Monique Fourniret, en faisant résonner sa voix, jusqu'au tréfonds de la folie, dans un face à face tendu avec les enquêteurs qui la traquent, ce roman plonge au cœur du mal pour arriver, par la fiction et la littérature, au plus près de la glaçante vérité.
Ce que j'ai à en dire après lecture ?
Pour ceux qui auraient été sur une île déserte ou plongé dans le coma au début des années 2000, je vous invite à aller lire l'article Wiki qui vous donnera les grandes lignes de cette affaire criminelle hors normes.
Juin 2003, sur une petite route de Belgique, une jeune adolescente parvient à échapper à une tentative de kidnapping. Un homme est arrêté quelques jours après et rapidement suspecté d'autres enlèvements non élucidés. Son nom, Michel Fourniret... C'est ici que commence le livre.
Pour comprendre le climat de tension, de suspicion qui suit cette arrestation, il faut avoir en tête que, à cette époque, la Belgique est encore plongée dans l'affaire Dutroux dont le procès va s'ouvrir dans quelques mois. Les forces de police sont donc sur les dents, encore meurtries des accusations virulentes qu'elles ont dû essuyées au sujet de leur travail sur cette affaire qui a touché en plein cœur toute la Belgique et ému le monde. Les flics qui ont le dossier Fourniret entre les mains savent qu'ils n'ont pas droit à l'erreur, que la vindicte populaire s'abattra sur eux s'ils "se loupent" !
La mésange et l'ogresse nous fait vivre cette année (un peu plus d'un an même !) où les enquêteurs vont tenter d'obtenir des aveux du couple infernal. Ce travail de fourmi où, audition après audition, les éléments apparaissent, où l'abattement des flics devant la résistance des accusés menace de prendre le dessus ... Je ne vais pas entrer plus dans le détail concernant le fond puisque nous savons tous comment cela s'est terminé. L'un des protagonistes a fini par avouer. Son nom, Monique Fourniret ... C'est ici que se termine le livre.
Le plus important, pour la lectrice que je suis, réside en réalité dans la forme de ce roman. Comment Harold Cobert réussit son pari, à savoir nous faire entrer dans la tête de Monique Fourniret ?
Il a choisi 4 angles de vue pour cela. Des flash backs informels pour les événements relatifs aux victimes, des extraits d'auditions, le point de vue de l'enquêteur principal et bien sûr les "pensées" de Monique Fourniret.
Pour les flash backs, ne vous attendez pas à du glauque ! L'auteur évite l'écueil des descriptions malsaines avec beaucoup de maîtrise. Il nous informe sans se complaire dans un voyeurisme licencieux.
Les extraits d'audition jalonnent le récit et apportent une compréhension de la partie d'échec qui se joue sous nos yeux. Judicieusement utilisés, ils font avancer le récit et surtout ils amènent à ces fameuses intrusions dans la tête de la pièce maîtresse qu'est Monique Fourniret dans cette partie d'échec.
Les incursions dans la vie de l'enquêteur principal sont là pour apporter la touche de quotidien. Ce quotidien qui se doit d'exister malgré la noirceur dans laquelle il est plongé en découvrant les profondeurs nauséabondes de l'affaire qu'il doit élucider. Cela permet aussi de mieux comprendre le travail abattu par son équipe et les difficultés rencontrées chaque jour par ceux qui choisissent de vouer leur vie à ce travail ingrat, celui de flic. En effet, le grand public oublie souvent qu'avant qu'il y ait procès, il faut qu'il y ait mise en accusation ... mais c'est un autre débat !
Pour ce qui est des pensées de Monique Fourniret, Harold Cobert m'a démontré qu'il était un grand écrivain. Il a réussi à me donner le tournis, à la limite de la nausée parfois. Cette réaction quasi physique n'était pas dû qu'au contenu de ces pensées mais, principalement, à leur "rendu littéraire". Des phrases sans ponctuation dont on attend la fin pour pouvoir respirer et s'extraire de ce galimatias. Des phrases sans fin qui nous entraînent dans un cyclone d'idées et nous font ressentir une perte de contrôle. Au fil du roman, ce "charabia" d'idées va évoluer, prendre du sens, se construire et nous (dé)livrer sa vérité ...
Je pourrais encore disserter sur ce livre pendant longtemps mais je m'aperçois que j'ai déjà été très volubile ! Alors je vais conclure de la plus courte des façons en le "notant" ...
Ma note : 20/20
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